Des remous lors des Inventaires
Les Inventaires des biens de l’Eglise sont mal vécus
La paroisse de Henvic n’échappe pas aux remous qui secouent le pays tout entier. La Loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, votée en 1905, entraîne l’année suivante, les Inventaires des biens de l’Eglise. Les militants catholiques se mobilisent partout pour s’y opposer.
Le 14 mars 1906, le bourg de Henvic connaît une journée mémorable. Un agent du fisc, Monsieur Pavie, Percepteur à Morlaix, s’y présente pour procéder à l’inventaire des biens de l’église paroissiale. Devant la porte principale de celle-ci, le Recteur Guillaume Le Jeune, entouré du Conseil de Fabrique, et de tous les paroissiens mobilisés, lui lit alors l’énergique protestation suivante:
“Monsieur le Délégué,
“Au nom du Conseil de Fabrique, et de tous les paroissiens de Henvic, au nom des nombreux bienfaiteurs de cette église, et en mon nom personnel, je me fais un devoir de conscience de protester avec toute l’énergie de mon âme, contre l’inventaire auquel vous avez la triste mission de procéder.
“Nous vous déclarons nous opposer formellement à cet inventaire, parce qu’il est le prélude à une confiscation sacrilège, et la première mesure d’exécution d’une loi condamnée par notre Saint Père le Pape et par tous les catholiques.
“Notre église, toute neuve, livrée au culte il y a trois ans, n’appartient ni à l’Etat, ni à la commune. Elle est avec tout ce qu’elle renferme, autels, vases sacrés, meubles, ornements, statues, croix, et bannières, propriété exclusive de la Fabrique, et de généreux donateurs. “Nous vous refusons donc l’entrée de cette église pour l’inventaire dont il s’agit, et, s’il est passé outre, nous faisons toutes réserves pour l’avenir, en invoquant le droit, la justice et la liberté. Et si un jour, on employait la force ouverte, les fidèles de Henvic sauront, comme leurs ancêtres en 1792, faire un rempart de leurs corps pour défendre leur Dieu, et la Maison qu’ils lui ont élevée.
Après cette lecture, Monsieur Le Jeune demande à ses paroissiens “-Etes vous d’avis que l’on procède à ces inventaires? -Non, non, jamais… l’église nous appartient…Nous sommes chez nous, Vive la liberté.”
Sur ce, M. Pavie s’est retiré, sans accomplir sa mission. Ensuite les fidèles sont rentrés dans l’église comble comme pour un jour de grande fête. M. Le Jeune a remercié chaleureusement les assistants, et le Chanoine Queinec, Curé Doyen de Taulé, a donné la Bénédiction du St Sacrement.
Les aménagements se poursuivent tout de même, dans l’église et dans la sacristie. De nouvelles statues, offertes par les paroissiens sont installées, et bénies, comme celle de ND de Lourdes ou encore de Ste Barbe. Le don de cette dernière a été fait « conformément au vœu que firent les paroissiens durant la nuit du 11 juillet 1904, lors de l’effroyable orage qui éclata vers 3 heures de l’après midi, et qui dura jusqu’à 11 heures le soir. La foudre tomba à Kerever, sur une grange contiguë à la maison d’habitation… »Si le feu a épargné la maison, on croit que c’est par miracle, dû à l’intercession de Ste Barbe, à laquelle les pauvres gens de la maison se sont recommandés ».