La chapelle Ste Marguerite
Ste Marguerite, la dernière chapelle de Henvic
Plusieurs chapelles ont existé autrefois sur le territoire de Henvic. L’abbé Pierre Nicolas en a recensé quelques unes. Il mentionne la chapelle Saint-Jean Baptiste, dite « du Poulbarat », qui se trouvait au Manoir de Lézireur. Cette chapelle n’existe plus depuis fort longtemps… Il évoque également la chapelle Saint Gildas, en ruines, près de Coatalec. « La chapelle St Gildas, écrit-il, était située au Nord-Est de la fontaine du Coatalec. Elle était entourée d’arbres. Devant la chapelle, il y avait un emplacement longeant la route qui monte à Laniélec. Une statue de cette chapelle, représentant St Gildas, est encastrée dans le pignon de l’ancienne maison d’habitation du Coatalec. De la chapelle, il ne reste plus que quelques pierres des fondements. » Au manoir de Coatplohou également, il y a eu autrefois une chapelle Ste Catherine.
Durant des siècles, ces édifices, construits par la noblesse locale, ont été les témoins de dévotions aujourd’hui oubliées, mais l’un d’entre eux est resté encore debout, malgré les attaques du temps, c’est la chapelle Sainte Marguerite, située près du Pont de la Corde, sur le bord de la Penzé.
Telle qu’elle nous apparaît de nos jours, la chapelle n’est pas très ancienne, mais son site doit dater de fort longtemps. C’est possible qu’elle ait été bâtie par quelque seigneur, au retour des croisades… d’où son appellation de Ste Marguerite d’Antioche. Selon la légende elle aurait été dévorée par un monstre dont elle en transperça le ventre pour en sortir indemne au moyen d’une Croix. Une autre hypothèse évoque le fait qu’il pourrait s’agir d’une représentation du Christianisme prenant le pas sur les religions précédentes, symbolisées par le dragon… A chacun de choisir la raison pour laquelle on la représente « hissée sur le dragon ».
Du monument actuel, nous ne savons pas grand-chose, sinon que sa dernière reconstruction remonte à 1878. Mais il est étonnant de voir que certaines parties de l’ouvrage sont très anciennes, comme par exemple les fenêtres, beaucoup plus riches que le reste de la maçonnerie, faite de pierre de schiste bleu. Pour cette reconstruction de la chapelle, ces pierres bleues avaient été données par la famille De Grainville, du Manoir de Trogriffon.
La chapelle avant sa restauration
Il est intéressant de constater que cette chapelle a été construite, comme beaucoup d’autres, sur l’itinéraire du Tro Breiz, ce grand périple qui connut jusqu’à des milliers de pèlerins par an, et qui était jalonné tout au long de son parcours, de nombreuses fontaines et chapelles, où les fidèles s’arrêtaient, pour se reposer en priant. La chapelle est située, en effet sur la route des pèlerins qui se rendaient de St Pol de Léon à Tréguier. Ils pouvaient se rendre directement à Morlaix, en empruntant le bac qui traversait la Penzé à cet endroit, qu’on appelait « an Treiz », « le Passage ».
Si le pardon de Ste Marguerite est célébré traditionnellement le 15 Août, le jour de la fête de la Vierge, alors que la Ste Marguerite se fête le 20 Juillet, c’est tout simplement parce qu’au début du siècle, les responsables de la paroisse ont estimé qu’en faisant le pardon ce jour-là, cela permettrait d’attirer davantage de monde. Il fut cependant supprimé durant quelques temps, le clergé craignant que la création d’une salle de danse au Pont de la Corde, présente trop d’attrait pour la jeunesse, après les vêpres! Durant les années 50, ce pardon a été l’occasion de grandes fêtes nautiques sur la Penzé, et la cérémonie était suivie de la bénédiction de la mer, en présence de toute la flottille henvicoise. Aujourd’hui, bien qu‘ayant perdu quelque peu de son faste d’autrefois, ce pardon demeure toujours bien vivant.
Mais cette chapelle n’a pas connu que des jours heureux. De vieilles complaintes, racontent comment à la suite de naufrages, l’édifice devenait chapelle ardente. On y amenait en effet les corps des noyés que l’on retrouvait sur les côtes de la Penzé. Depuis fort longtemps, et jusqu’à ces dernières années, beaucoup de paysans henvicois partaient « faire le goémon », avec la marée, vers les îlots situés près de Carantec. Ils revenaient avec les bateaux chargés à ras-bord, de ce précieux engrais pour les champs. Par beau temps, tout allait bien, mais si le vent se levait dans le sens contraire aux courants, très forts dans l’estuaire, cela pouvait entraîner des catastrophes.
Le décor intérieur est extrêmement modeste. Le sol est fait de dalles de schiste bleu, et les murs sont juste blanchis à la chaux. Deux statues anciennes ornent le retable : Ste Marguerite, et son dragon, polychrome. Il s’y trouve aussi une Notre-Dame en bois naturel, plus récente, mais de très belle facture, ainsi qu’un bateau sous globe, que l’on sortait autrefois pour les processions : Le bateau de St Maudez, « Bag Sant Vodez »,
S’agit-il de la même cloche que celle dont Louis Le Guennec nous rapporte la cérémonie de baptême? « Le 2 Octobre 1763, Messire Jean-Marie Audren du Porzlan bénit, « avec les cérémonies de l’Eglise Romaine, une cloche destinée pour la chapelle de Ste Marguerite, située dans l’étendue de la trève de Henvic, et nommée Yves-Marie, par noble Yves-Yacinthe Chevalier, garde général des magasins du Roi, et de la marine au port de Brest, et demoiselle Jeanne-Marie Bernard de Trogriffon ».
Bien que sa construction soit toute simple, et que pour cette raison, elle n’ait jamais fait l’objet d’un classement par les services des Monuments Historiques, elle n’en demeure pas moins un héritage de nos ancêtres henvicois, auquel de très nombreuses personnes restent très attachées. Il y a quelques années, elle menaçait de tomber en ruine, quand la municipalité de Henvic, et l’association « L’AMER » de Henvic, y ont fait effectuer d’importants travaux, assurant ainsi son sauvetage. L’association des Amis de Ste Marguerite se charge dorénavant de faire vivre ce site, en remettant à l’honneur le pardon du 15 août, en y proposant chaque années des des crèches de Noël, que viennent voir de très nombreux visiteurs, et en organisant des concerts.
Pour en savoir plus.. Ste Marguerite et son culte en Finistère