Les bouleversements au moment de la Révolution
Une période de troubles
La vie quotidienne des henvicois doit certainement continuer comme auparavant, dure et laborieuse, et les évènements de 1789 ne semblent pas trop troubler la population. Par contre, la Constitution Civile du clergé, votée par l’Assemblée Nationale le 12 Juillet 1790, sera le point de départ d’une période de troubles.
La population bretonne, loin de se rallier à ce clergé assermenté, garde une fidélité envers ses prêtres. Ceux-ci doivent entrer dans la clandestinité en raison des mesures prises contre eux.
En 1790, arrivent les prêtres François Prigent, né à Henvic, et Hervé Hervet, son vicaire. Refusant de prêter serment à la Constitution, ces deux prêtres réfractaires doivent se cacher, pour exercer en secret leur ministère. Ils continuent à célébrer et à donner les sacrements à leurs paroissiens. Toute la population les soutient et les aide. Le 6 Janvier 1792, la trêve de Henvic, qui avait été indépendante pendant 300 ans est supprimée, et est incorporée à la paroisse de Taulé.
Le Sieur Elien, curé constitutionnel de Taulé, tient absolument à ce que les prêtres de Henvic demeurés fidèles en fussent éloignés. Refusant d’avoir recours à celui-ci pour baptiser leurs enfants, les « tréviens » de Henvic entament alors une lutte, et adressent au District et au Département une réclamation virulente.
Un évènement qui fait du bruit… l’enlèvement des cloches
Devant cet état de fait, le prêtre constitutionnel demande à ce que l’église de Henvic soit fermée, et que les cloches soient enlevées. Le bourg subit alors une véritable expédition armée pour enlever les cloches de l’église. « Pendant les pourparlers, il s’est fait un attroupement d’hommes dans le cimetière, armés de bâtons et de fléaux. Le tumulte a été grand, les cris et jurements énormes, que si on prétendait toujours avoir les cloches et ce qu’il y avait dans la sacristie, dans l’instant, la poussière du cimetière serait teinte du sang humain ». Les gendarmes venus de Morlaix en compagnie du curé Ellien, ne durent en fait leur salut que dans la fuite, non sans avoir constaté la présence de « beaucoup de nouveaux crachats autour des confessionnaux, de la table de communion et dans différents endroits de l’église, et dont aucun desdits crachats n’étaient encore desséchés, ce qui prouve que les prêtres réfractaires y exercent encore le culte ».
Le lendemain de cette rébellion, « le 29 Avril 1792, sont envoyés à Henvic, 120 gardes nationaux, 120 volontaires nationaux, une compagnie de canonniers, deux pièces de canon, et une brigade de gendarmes ». La municipalité, ne fait pas d’opposition à l’enlèvement des cloches et des ornements, mais déclare ignorer où sont les prêtres assermentés, et ne pas connaître les individus qui se seraient livrés à des voies de fait lors de la première descente.
Quoiqu’il en soit, M Prigent et Mr Hervet ne désertent pas leur poste, et bien qu’ils aient repoussé leur serment civique, ils peuvent continuer d’exercer leur ministère jusqu’à la fin de l’hiver 1792. Toute la population de la presqu’île vient à l’église de Henvic, malgré la fureur du curé de Taulé.
Au moment de la révolution, le bourg de Henvic n’est pas très étendu et sa physionomie ne changera pas beaucoup jusque vers les années 1900. Deux maisons au plus se trouvent dans le voisinage du cimetière qui entoure l’église, le presbytère, et la maison du four banal. Quatre autres habitations sont bâties vers 1830, la Mairie, en 1868, l’école des filles, (l’actuelle école publique), en 1879, la maison de Mr JM Nicolas, commerçant, a été bâtie en 1887 sur l’emplacement de deux maisonnettes construites en 1834 et 1835. La population est essentiellement rurale, et habite dans des fermes à la campagne. La paroisse possède beaucoup de biens. Une déclaration du Maire et des officiers municipaux, datée du 9 Mai 1790, énumère les biens tenus à titre de fermage et les rentes foncières. A cette époque, la Fabrique de Henvic avait 9 fois plus de rentes qu’elle n’en a un siècle plus tard. Les membres du Conseil de Fabrique de Henvic, certifient que tous les biens immeubles dont elle jouit alors, et que la Fabrique a achetée de ses deniers, étaient en sa possession avant la Révolution.